Hymnes et Séquences à trois voix de Guillaume DUFAY (1367-1474) au fil des grands moments de l'année liturgique |
Programme
du concert |
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AVENT
Aspiciens
a longe....................................................................................grégorien
NOËLrépons des Matines du 1er dimanche de l'Avent Ave Maris stella.................................................................G. Dufay (1367-1474) hymne pour les fêtes de la Sainte Vierge Puer
natus est ..........................................................................................grégorien
EPIPHANIEantienne d'introït du 7e mode pour la fête de Noël Laetabundus ............................................................................................G. Dufay séquence de la fête de Noël Alleluia.
Vidimus ..................................................................................grégorien
CARÊMEalleluia du 2e mode pour la fête de l'Epiphanie Epiphaniam Domini .............................................................................G. Dufay séquence pour la fête de l'Epiphanie Emendemus
in melius
........................................................................grégorien
PÂQUESrépons des Matines du 1er dimanche de carême Vexilla Regis.............................................................................................G. Dufay hymne du temps de la Passion Haec
dies..................................................................................................grégorien
ASCENSIONgraduel du 2e mode pour la fête de Pâques Victimae paschali laudes ....................................................................G. Dufay séquence pour la fête de Pâques Viri
Galilaei.............................................................................................grégorien
PENTECÔTEantienne d'introït du 7e mode pour la fête de l'Ascension Rex omnipotens......................................................................................G. Dufay séquence pour la fête de l'Ascension Alleluia.
Veni Sancte Spiritus
.........................................................grégorien
ASSOMPTIONalleluia du 2e mode pour la fête de la Pentecôte Veni Sancte Spiritus.............................................................................G. Dufay séquence pour la fête de la Pentecôte Kyrie – O
sacra Virgo
...............................................anonyme
(Ms Apt 14e s)
trope de kyrie pour une fête de la Vierge |
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Présentation
du programme |
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Joyaux de polyphonie
médiévale, les hymnes et
séquences à trois de voix de Guillaume Dufay (1397- 1474) sont mises en
perspective à travers l'alternance de monodies grégoriennes, en suivant
le
cours de l'année liturgique. Ces pièces sont autant de médaillons dans
une
grande verrière qui déploie ses couleurs sur toute l'année, dont on ne
goûte la
pertinence démultipliée que lorsque, riche du détail, le regard consent
à
nouveau à l'ensemble. Aussi, la procession du temps et ses délicates
nuances
sont à ce répertoire ce que le soleil, au fil des heures, est au
vitrail. S'il
fallait décrire par la géométrie l'esprit de ces musiques, il suffirait
de se
souvenir que : "au commencement était le Verbe",
que le
Verbe par le prophète s'est fait Ecriture, que
l'Ecriture par le chantre
s'est faite louange, et qu'enfin la louange, depuis
que le Verbe s'est
fait chair, ne peut qu'être actuelle, c'est-à-dire
liturgique,
s'inscrivant dans la densité d'un instant présent sans cesse
reconduit :
les "Heures" du jour, les jours de l'année, les années d'une vie,
constituant ce seuil d'éternité sur lequel il fait bon s'attarder… Il faut donc que l'Ecriture soit chantée, il faut que le Livre donne son Verbe aux lèvres, et que celles-ci le chantent si bien que le chant atteigne à la joie de l'oreille, avant de revenir, à nouveau intériorisé, aviver l'ardeur du cœur. Fides ex auditu - la foi par l'écoute. Un disciple s'empare du texte et contemple son objet et, par là, passe infiniment la seule connaissance intellectuelle. C'est ainsi que, jusqu'à la fin du 18e siècle, le joie créatrice a été non pas d'inventer ou faire œuvre d'originalité dans le répertoire sacré, mais simplement d'hériter du trésor révélé – Dieu a parlé aux hommes ! – auquel on associe ici et maintenant son propre regard contemplatif. On s'inscrit ainsi dans une logique vivante de l'héritage, dans une filiation et une transcendance dont les hommes sont témoins, dès avant leur naissance et encore après leur mort, tandis que demeure, même sur terre à l'instar de l'office des anges du ciel, la laus perennis - la louange perpétuelle. Exemple par excellence de ce déploiement organique dans l'écho du Verbe révélé, la convergence tout en douceur et pour ainsi dire naturelle entre la monodie grégorienne et les premières polyphonies. Sans doute en se développant, la polyphonie a quelquefois semblé consommer son autonomie. En fait, c'est un trompe-l'œil tel que l'art en raffole afin d'attirer l'attention sur le miroitement et l'émerveillement. Au-delà de l'artifice cependant, la réalité musicale reste convergente et fort simple. C'est la même attention contemplative qui regarde fixement le Verbe et qui l'aime de dilection. Parce qu'elle l'aime, elle ne sait rien d'autre que le chanter, ou l'adorer en silence ! Voilà donc une musique infiniment cordiale et qui est la manière contemplative qu'avaient nos ancêtres de "lire" le Livre révélé. Illustrant un moment de cette histoire où la convergence est particulièrement saillante, l'Ensemble Ex Corde propose un programme qui emprunte à l'antiquité grégorienne et au flamboyant 15e siècle. La narration suit le fil d'une année liturgique en jouant tour à tour de la transparence d'une monodie tirée d'antiphonaires des 8-9es siècles et du chatoiement d'une polyphonie à trois voix (séquences et hymnes) que Guillaume Dufay, dans le même élan, compose au 15e siècle. C'est un programme de concert bien sûr, qui ne donne qu'une pâle image du poème que la liturgie déploie dans le sanctuaire réservé de son art, lorsque jour après jour, année après année, heure après heure, elle épouse la Vie du Sauveur en suivant patiemment la métaphore cosmique du cycle solaire, image on ne peut plus temporelle – et néanmoins lumineuse – de l'éternité. Et en effet, à quel que moment que l'on soit de cette histoire martelée par les Heures, c'est toujours le même zénith que la charité poursuit invariablement. Qu'il s'agisse de l'architecture romane des fondements grégoriens ou des ogives du gothique-flamboyant de Dufay, c'est la même dynamique : la Caritas chante son Bien-Aimé ! |
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© Bertrand Décaillet | ||||
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